En début du confinement, plus de 820 chambres d'hôtel ont été ouvertes à Bruxelles pour accueillir les personnes sans-abri. Mais entre-temps, ces structures ont été progressivement fermées, et il reste officiellement 192 places (selon Bruss'help).

Chez Infirmiers de rue, nous le regrettons profondément.

Alors que la deuxième vague de Covid se renforce de jour en jour, il apparaît clairement que nos efforts pour fournir le plus rapidement possible à ces personnes un abri qui va plus loin que l’accueil d’urgence, demeurent primordiaux afin de maîtriser à la fois la pandémie et le problème du sans-abrisme. La crise crée une occasion d'aller de l'avant, encore faut-il la saisir.

Rue vide

En vue de l'hiver qui approche, 990 places d’hébergement d'urgence classique sont disponibles au SAMU SOCIAL. En outre, environ 140 places ont été créées par diverses autres structures, avec le soutien de la Région. Certaines resteront accessibles à plus ou moins moyen terme, d'autres sont de véritables logements pour des périodes allant jusqu'à 5 ans ! Ceci est une très bonne chose. Mais il devrait être possible de faire plus, et de profiter de la crise qui met le secteur hôtelier en difficulté pour contribuer à résoudre de façon plus durable et plus importante la problématique du sans-abrisme.

En ce qui nous concerne, nous estimons que les hôtels sont un excellent moyen d'accueillir les personnes sans abri à l'heure du Covid, bien mieux que les hébergements d'urgence classiques. Les personnes sans-abri peuvent y être vraiment isolées en petits groupes, ou même individuellement. C'est un hébergement plus calme, qui offre plus d'intimité que dans les hébergements d'urgence, qui sont généralement surpeuplés et peu sûrs. Cela signifie également qu'il y est beaucoup plus aisé de travailler à la réintégration et au relogement durable, là où l'hébergement d'urgence traditionnel est beaucoup moins adapté.

Aujourd'hui, la capacité d'accueil des personnes sans-abri reste encore trop faible par rapport aux besoins réels. Nous sommes donc encore loin de trouver une solution optimale pour toutes les personnes qui doivent survivre en rue. Avec les autres organisations du secteur, nous continuons à insister pour que le système de mise à disposition de chambres d'hôtel soit pleinement réactivé et étendu. La crise actuelle du secteur hôtelier, dans lequel des milliers de chambres restent vides, crée une occasion unique pour cela. Et le secteur hôtelier ne peut qu'en profiter lui aussi.

L'utilisation des hôtels ne résout certainement pas tous les problèmes liés au logement durable. Mais les conditions sont bien meilleures pour atteindre cet objectif que si les gens restaient dans la rue ou dans un abri d'urgence classique. Nous constatons dans notre pratique quotidienne que les avantages sont nombreux.

Si nous débloquons aujourd'hui les ressources nécessaires - soutien financier aux hôtels, temps et aide des CPAS, coopération avec les organisations d'aide, et accès à un logement suffisant - nous pouvons faire d'une pierre trois coups : réduire la crise du Covid en retirant les gens des espaces publics, éviter un certain nombre de faillites dans le secteur hôtelier et réduire le sans-abrisme en relogeant une partie des personnes sans-abri. Nous aurions alors fait de la crise une véritable opportunité !

 

Dr. Pierre Ryckmans

Coordinateur médical Infirmiers de rue