Il y a plusieurs points communs entre nos patient·es, mais il y en a un qui est universel : la solitude

Quand un·e de nos patient·es est prêt·e à intégrer un logement, il s’agit d’un moment souvent perçu comme une victoire, mais cette victoire est en réalité empreinte d’une complexité émotionnelle que peu de gens imaginent. En effet, la solitude, qui a déjà été un compagnon constant dans la vie des personnes sans domicile, peut devenir encore plus pesante une fois relogées.

Dans les rues de Liège, la vie est rythmée par des interactions quotidiennes, que ce soit avec d’autres personnes sans-abri, des bénévoles ou même des passant·es. Ces échanges, bien que souvent fugaces, créent un semblant de communauté, une solidarité née de la précarité. Les rires partagés, les histoires racontées ou les petites attentions échangées forment un tissu social fragile mais réconfortant.
 

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Le logement n'efface pas l’isolement émotionnel

Cependant, une fois dans un nouveau logement, le tableau change radicalement. Les murs d’un studio ou d’un appartement peuvent rapidement devenir une prison de solitude. Les journées, désormais silencieuses, laissent place à des pensées qui tournent en boucle. L’absence de contacts humains, de rituels de rue, pèse lourdement sur le moral. L’isolement devient la norme, et la transition vers la vie “normale” se transforme en un combat contre une solitude omniprésente.

Les personnes anciennement sans-abri, bien qu’elles aient trouvé un toit, se retrouvent souvent démunies face à la réalité du quotidien. Les ami·es de la rue sont désormais éloigné·es, et les liens tissés au fil du temps se distendent. Les visites des travailleur·euses sociaux·ales, bien qu’indispensables, ne remplacent pas les interactions chaleureuses et authentiques que l’on pouvait avoir auparavant. La solitude, qui était partagée dans la rue, se transforme en un isolement personnel, où chaque minute semble s’étirer indéfiniment.

Cette nouvelle solitude peut engendrer des souvenirs douloureux de la vie antérieure, des luttes et des pertes. Les personnes relogées doivent souvent faire face à des sentiments de honte ou de culpabilité, se demandant si elles méritent vraiment ce nouveau départ. La difficulté à s’adapter à cette nouvelle vie, à sortir de l’ombre du passé, peut les replonger dans une spirale négative.

Réinsertion sociale : recréer du lien après le relogement

Les murs du logement, au lieu de symboliser un refuge, deviennent le reflet d’une solitude dévorante.

Le chemin vers la réinsertion ne se limite pas à la simple fourniture d’un logement. Il est essentiel de reconnaître et d’accompagner les personnes relogées dans la lutte contre cette solitude grandissante. Créer des espaces de rencontre, favoriser les échanges et construire une nouvelle communauté sont des étapes cruciales pour que chacun·e puisse se réapproprier sa vie et retrouver un sens d’appartenance.

 

Nicolas, infirmier à l'antenne de Liège 

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