Pour les personnes vivant dans la rue, les pieds sont bien plus qu’un moyen de transport : ils sont essentiels à leur survie quotidienne. Chaque jour, elles marchent plusieurs kilomètres, souvent avec des chaussures inadaptées ou usées. Sans accès régulier à l’hygiène, à l’eau ou aux soins de santé, les problèmes de pieds deviennent fréquents et peuvent avoir de graves conséquences.

Chez Infirmiers de rue, nous rencontrons ces situations tous les jours : des pieds fatigués, blessés, douloureux mais aussi un point d’entrée crucial pour recréer du lien et accompagner vers les soins.
 

Mycoses et infections fréquentes

Les mycoses plantaires (ou mycoses entre les orteils) sont parmi les affections les plus courantes chez les personnes sans-abri. Ces infections, causées par des champignons dermatophytes, se développent dans des environnements chauds et humides comme les chaussures fermées, les douches collectives ou les sols mouillés.

Les symptômes typiques sont des fissures et démangeaisons entre les orteils, une peau blanche ou abîmée et parfois des cloques douloureuses.

Un traitement antifongique local, associé à des bains de pieds, permet souvent une amélioration rapide. En plus de son effet thérapeutique, le bain de pieds est un moment d’écoute et de bien-être : un geste simple mais profondément humain.
 

Autres problèmes de pieds chez les personnes sans-abri

En accompagnant les personnes vivant à la rue, nos équipes constatent souvent des callosités et cors, causés par la marche prolongée et des chaussures trop serrées, des verrues plantaires et yeux-de-perdrix, douloureux et gênants pour marcher ou encore des ongles incarnés, favorisés par le manque d’hygiène ou une coupe incorrecte.

Ces lésions, bénignes au départ, peuvent s’aggraver rapidement. Sans soins adaptés, une simple plaie peut évoluer vers une infection grave. L’intervention d’un podologue ou d’un infirmier de rue formé à ces problématiques est alors essentielle.
 

Plaies chroniques : un risque de dégradation grave

Les plaies ouvertes sont particulièrement préoccupantes. Les conditions de vie dans la rue (froid, humidité, saleté, absence de matériel stérile) retardent la cicatrisation. Certaines plaies, couplées à l’impossibilité de prendre des antibiotiques de manière régulière, mettent des mois, voire des années à guérir, se surinfectent, et peuvent conduire à une amputation.

Plusieurs facteurs aggravent ces situations comme la malnutrition et le manque de protéines, les changements de température ou la consommation de drogues ou d’alcool.

Les personnes diabétiques sont encore plus à risque : leurs nerfs et leur circulation sanguine sont souvent altérés, ce qui rend les plaies plus profondes et plus lentes à cicatriser.

Dans certains cas, une hospitalisation est la seule solution pour offrir un environnement de guérison adéquat mais les places disponibles pour ce type de prise en charge restent rares.
 

Prévention et accompagnement : le rôle d’Infirmiers de rue

Chez Infirmiers de rue, la prévention fait partie intégrante de nos missions.

Nos équipes de terrain interviennent directement auprès des personnes sans-abri pour évaluer l’état des pieds, proposer des bains de pieds et des soins simples, sensibiliser à l’importance des chaussettes sèches ainsi qu’orienter vers des soins spécialisés si nécessaire.

Ces gestes, parfois modestes en apparence, ont un impact énorme sur la santé, la mobilité et la dignité des personnes rencontrées.
 

Conclusion

Prendre soin des pieds, c’est aussi prendre soin de la personne.

Les pieds racontent souvent l’histoire des conditions de vie des personnes sans-abri. En prenant soin d’eux, nous agissons à la fois sur la santé physique, le bien-être et la reconstruction du lien social.

 

- Article écrit par Manon Bayot, infirmière et responsable de l'équipe logement

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