La gestion du budget est souvent un sujet de tension dans les accompagnements que nous effectuons en logement. Pour que les personnes puissent rester dans leur appartement, il faut s’assurer que le loyer soit payé et que les factures ne s’accumulent pas.

Si cela s’avère nécessaire, nous proposons aux patient·es de travailler avec un administrateur de biens, responsable de la gestion de leur budget. Cette décision implique une certaine perte de liberté et de maîtrise de leur vie. Tout le monde ne l’accepte pas.

Monsieur T., conscient que sa situation se détériorerait gravement, a lui-même formulé la demande d'une mise sous administration de biens, lors d’une hospitalisation. 

Malheureusement, la personne désignée par le juge ne s’est pas montrée à la hauteur de ses responsabilités. En plus d’avoir été injoignable pendant des semaines, les premiers contacts avec Monsieur et l’équipe d’accompagnement ont été difficiles : propos peu élogieux envers Monsieur et demande d’actions intrusives dans sa vie.

S’en sont suivis plusieurs mois de collaboration presque inexistante et conflictuelle, durant lesquels Monsieur s’est retrouvé sans revenus à plusieurs reprises. Cette période a, non seulement, mis à mal notre patient dans sa volonté d’aller mieux et de demander de l’aide, mais a également menacé la relation de confiance qu’il avait construite avec Infirmiers de rue.

Après l’avoir rassuré, nous avons finalement réussi à effectuer un changement d’administration de biens.

Sa situation financière est maintenant stabilisée et entre les mains d’une personne avec qui nous collaborons depuis longtemps et en qui Monsieur apprend à faire confiance.

Ce passage de sa vie est représentatif des préjugés, freins et injustices auxquels les personnes qui ont une situation psycho-médico-sociale fragile peuvent parfois faire face. Cela démontre également l’importance de bien s’entourer et d’entretenir des collaborations de qualité, avec des personnes exerçant différents métiers, mais faisant preuve d'humanité, de sensibilité, de disponibilité et de réactivité, nécessaires à l’accompagnement de notre public.

 

(*) Nous mettons tout en œuvre pour respecter la vie privée de nos patient·es et notre secret professionnel. Nous voulons néanmoins témoigner de la façon dont ils·elles doivent survivre et de la manière dont nous travaillons ensemble à leur réinsertion. Par conséquent, le nom des lieux et des personnes sont volontairement omis ou modifiés et des situations vécues sont placées dans un autre contexte.